Plus que la marque de fabrique de Marne-la-Vallée, le bois est devenu aussi une des garanties d’innovation du territoire. Pionnier dans la construction bois, l’aménageur a su fédérer toute une filière pour passer d’une logique de prototypes à celle de production industrielle. Explications.

Propos recueillis par Business Immo dans l’édition spéciale EPAMARNE-EPAFRANCE de Décembre 2017.

 

« Plus que jamais, le bois réapparaît comme matériau de construction dans la ville. » C’est la conviction profonde de Patrick Molinié, responsable développement construction FCBA (Institut technologique Forêt Cellulose Bois-Construction) et chef de projet Woodrise, le premier congrès sur la construction bois moyenne et grande hauteurs, qui s’est tenu à Bordeaux du 12 au 15 septembre 2017. Les enjeux sont énormes. Sur le plan environnemental bien évidemment. « Le bois fait aussi partie intégrante de la réflexion sur les territoires bas carbone avec le nouveau label E+C- », rappelle Patrick Molinié.

La première vertu du bois repose sur ses capacités de séquestration du carbone : 1 m3 de bois permet de retirer 0,9 t de CO2 de l’atmosphère. Mais le bois est aussi le matériau de construction dont la production nécessite le moins d’énergies fossiles non renouvelables : quatre fois moins que le béton, 60 fois moins que l’acier et 130 fois moins que l’aluminium. Quand on sait que le secteur du bâtiment est le plus émissif avec plus de 27% de l’empreinte carbone de la France, devant les transports, et que 1 m² de bâtiment neuf construit représente 1,5 t de CO2 émis, on mesure le formidable levier que représente la construction bois. D’autant qu’il y a urgence, compte tenu de la croissance démographique mondiale et de l’urbanisation. Le climatologue Jean Jouzel rappelle que si l’on ne change rien, le bâtiment pourrait à lui seul consommer près de 50 % des émissions que nous pouvons encore nous permettre si nous voulons limiter le réchauffement climatique à moins de 2 °C, conformément à l’Accord de Paris.

On comprend donc que ce matériau est naturellement l’un des piliers de la construction bas carbone, représentée depuis 2015 par l’Association BBCA (Bâtiment Bas Carbone). « À ce jour, 27 opérations immobilières ont reçu le label BBCA. Elles intègrent souvent du bois mais nombreux sont les bâtiments aux systèmes constructifs mixtes bois/béton », précise Hélène Genin, la déléguée générale de l’association.

Les enjeux en matière de construction bois sont également économiques. Le marché de la construction bois s’est élevé à 1,68 Md€ en 2016 en France, selon le cabinet Xerfi. Il pourrait s’envoler de plus de 20% en valeur entre 2017 et 2020 pour dépasser les 2 Mds €.

« Dans le collectif et le non-résidentiel, l’automatisation de la production va indéniablement soutenir le recours au bois, par exemple pour réaliser des résidences étudiantes ou des logements sociaux, conclut l’étude. Car c’est bel et bien la capacité des acteurs à sortir de leur créneau historique, la maison individuelle (où la part de marché du bois est tombée à 9% en 2016), et donc à évangéliser les marchés du loge- ment collectif (4% des nouvelles réalisations seulement en 2016) et du non-résidentiel, qui conduira la filière sur le chemin de la croissance durable », expliquent les experts du cabinet Xerfi. « Il s’agit de porter la part de marché du bois dans la construction de 5-6% à 20% à horizon 2020 dans le monde, confirme Patrick Molinié. Pour cela, il faut attirer à nous aménageurs, promoteurs et bailleurs sociaux. »

De multiples opérations

C’est la réalité sur le territoire de Marne-la-Vallée, qui contribue fortement à développer ce marché. Le territoire est pionnier en la matière et un démonstrateur vivant de la construction en bois avec des bâtiments exemplaires et récompensés. C’est le siège du laboratoire du FCBA, lauréat du grand prix Simi en 2014 et trophée d’argent du Cadre de vie Fimbacte 2014. C’est la résidence « Les Lodges », labellisée « Bâtiment exceptionnel d’Île-de-France » par l’Ademe, « prix de l’ innovation et pyramide d’argent 2015 ». C’est encore un groupe de logements HLM conçus par les architectes Jean et Aline Harari pour le groupe 3F, 1er Prix national de la construction bois en 2015.

Ces premières réalisations illustrent le développement depuis plusieurs années d’une véritable filière bois sur tout le territoire de Marne-la-Vallée. En 2016, plus de 60% des logements engagés par EPAMARNE/EPAFRANCE sont en bois, soit plus de 1 150 logements. « Une performance qui fait de nous des pionniers », se félicite-t-on au sein d’EPAMARNE qui a su tisser un réseau de partenaires de la construction bois, de l’Institut technologique FCBA à l’association professionnelle Adivbois, sans oublier les constructeurs comme Techniwood, Woodeum, Arbonis, Ywood… Ce réseau permet à Marne-la-Vallée de développer dès à présent des projets ambitieux et innovants en construction bois. On y retrouve du résidentiel classique ou des résidences pour étudiants avec une variété de programmes à ossature et en partie en façade bois, notamment le programme de la Résidence urbaine de France à Chanteloup-en-Brie, premier projet immobilier associant Bim-Bois-Bepos. Des projets à vocation touristique s’emparent du bois, à l’exemple des cottages des Villages Nature®. Mais l’un des projets en bois les plus emblématiques parmi la vingtaine lancée en 2015 et 2016 est certainement « Treed It ». Un démonstrateur des innovations technologiques et comportementales de 21 000 m² lancé par Vinci Construction France : le premier R+11 de France construit en ossature bois avec un parking sur deux niveaux. Développée par sa filiale Arbonis, cette tour comprendra une grande innovation technologique de plancher « bois béton connecté » préfabriqué. Plus fort encore avec « Bois XXII », un immeuble qui propose tout simplement de garantir un bon confort d’été en 2020… en 2120 ou en 2200, quelle que soit l’évolution du climat et sans autre technique que les qualités mécaniques propres au bois !

Enfin, c’est à Villiers-sur-Marne, dans l’Est Parisien, que verra le jour en 2024 Marne-Europe, le plus grand quartier en bois d’Europe : le projet « Balcon sur Paris » de la Compagnie de Phalsbourg prévoit en effet de réaliser 60% du quartier en bois, ce qui représente 900 ha, soit l’équivalent du bois de Vincennes.

Croquis du Treet It, futur immeuble R+11 à la Cité Descartes
Treet It, futur immeuble R+11 à la Cité Descartes (plus haute construction bois de France), à Champs-sur-Marne comprenant des bureaux, une résidence étudiante, des commerces et des services.
© ADIM-Vinci Construction

Le bois dans la ville

À la pointe de la construction bois, EPAMARNE veut aller encore plus loin demain. L’Établissement public d’aménagement (EPA) réfléchit à trois pistes supplémentaires sur lesquelles il souhaite attirer des compétences et des projets. La première consiste à faire entrer les feuillus (châtaigner, chêne, peuplier, aulne, hêtre…) dans la construction. Ces derniers ont l’avantage de la diversité des utilisations de chaque essence et offrent un approvisionnement plus souple même si leur emploi est plus complexe que celui des résineux. La deuxième piste vise à associer le bois avec d’autres matériaux : verre, métal, terre crue et même matériaux issus de déblais, tout aussi bien pour profiter des propriétés mécaniques de chacun des composants, que pour optimiser le réemploi dans une vision durable. Au-delà de la construction, EPAMARNE veut poursuivre les recherches pour l’utilisation du bois dans l’espace public, là où ses qualités visuelles et sensorielles peuvent apporter des sensations différentes. Parmi les pistes de recherche, par exemple : une passerelle en bois pour relier deux espaces verts, du bois pour marquer un usage souple des trottoirs à côté d’une chaussée traditionnelle, un bout de voirie en bois pour renforcer le confort d’un espace protégé… Demain, le bois s’invitera à l’échelle du quartier. Il sera l’un des piliers des futurs quartiers bas carbone dont l’Association BBCA a dessiné les contours : une architecture optimisée qui privilégie l’économie des matériaux ; l’utilisation de matériaux bas carbone et recyclés ; la limitation des déchets de chantier ; la sobriété énergétique combinée à la production locale d’énergie avec le recours aux énergies renouvelables ; les réseaux intelligents/smart grids et l’économie circulaire avec la mutabilité des usages et le recyclage en fin de vie. « La lutte contre le changement climatique passe par un aménagement urbain à l’empreinte carbone exemplaire », assure Stanislas Pottier, président de l’Association BBCA et directeur du développement durable au Crédit agricole.

Photographie du siège social du laboratoire de FCBA, à Champs-sur-Marne
Le siège social et laboratoire du FCBA réalisé par l'Atelier 4+, implanté à la Cité Descartes, à Champs-sur-Marne.
© Epamarne / Architecte : Atelier 4+ / photo : Antoine Meyssonnier

Le FCBA, l'expert bois

Promoteur de l’innovation et du progrès technique de l’ensemble de la filière bois, le FCBA (Institut technologique Forêt Cellulose Bois-Construction) est devenu l’interlocuteur incontournable pour les acteurs de la filière bois. Le centre technique industriel français, chargé des secteurs de la forêt, de la cellulose, du bois-construction et de l’ameublement est même l’un des partenaires à l’origine de la création de Woodrise, le premier congrès dédié aux bâtiments bois de moyenne et grande hauteurs.

Aussi, le FCBA s’est imposé instinctivement comme le partenaire naturel de la construction bois à Marne-la-Vallée. D’abord parce qu’il a installé son siège social au cœur de la Cité Descartes, à Champs-sur-Marne, dans un bâtiment exemplaire dans l’utilisation du bois. Livré début 2015, cet élégant ensemble de 10 000 m², comprenant 6 000 m² de laboratoires et 4 000 m² de bureaux sur quatre niveaux, a été entièrement réalisé en structure bois avec des façades porteuses à ossature bois. Une véritable prouesse pour un immeuble imaginé dès 2011. D’ailleurs, il sera récompensé d’un grand prix Simi quelques semaines avant sa livraison.

Ensuite, parce que le FCBA a prolongé son lien avec Marne- la-Vallée au travers d’un accord avec l’EPA pour développer l’utilisation du bois et des matériaux biosourcés dans les futures constructions. Ce partenariat s’appuie sur deux axes majeurs de collaboration avec la mise en place d’une démarche d’animation pour la valorisation du bois et des matériaux biosourcés au travers notamment de workshops, ainsi que l’appropriation d’une « compétence bois » par les acteurs de l’EPA, tout particulièrement par la mise en place de séances de formation et de missions d’assistance à la maîtrise d’ouvrage. Dans la droite ligne de sa mission de promotion du matériau bois, le FCBA a mis en place depuis le début des années 2000, INNOVATHEQUE®, le 1er centre européen de ressources, de veille et de conseil en matériaux et process au service des designers, des architectes, des agenceurs et des industriels de tous secteurs à la recherche de solutions techniques innovantes.

Cette culture autour de la construction bois irrigue désormais de nombreux projets immobiliers, même les plus inattendus comme ce parking de 100 places à deux niveaux en bois, réparable en cas d’incendie de véhicule ! Un projet où le FCBA est un partenaire clé.

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